Tales of Symphonia partie 2-Chap 02-Réminiscences
***(en gras figurent les retours en arrière)***
Ce matin là, plus que tout autre,
la place du marché battait son plein et dans toutes les bouches il n’était plus
question que de ça.
Son regard acéré embrassa
l’ensemble de la place publique avec ses étals colorés malgré le manque évident
de produits. Les marchands essayaient de garder leur optimisme légendaire et
redoublaient d’effort de vente pour écouler leurs stocks à des prix exorbitants.
Mais que faire ? Il leur fallait bien vivre eux aussi.
L’œil morne, les matronnes
houspillant leur marmaille, et les cuisinières, passaient devant les étalages
sans rien acheter, pour la plupart. Ce matin pourtant l’ambiance était plutôt à
la fête. Si des troupes partaient en campagne, c’était, pour sur, dans le but
de régler ce problème de monstres et mettre fin à la pénurie de nourriture.
Les blocus aux portes de la ville
pour trouver le groupe de la fausse élue de la régénération (c’était ainsi en
effet que le Pontife avait présenté Colette et ses amis afin de faire passer
sans trop de protestations ses mesures de sécurité draconiennes auprès du bon
peuple de Meltokio) serait sans aucun doute levés. Pour la première fois depuis
des semaines, l’avenir s’annonçait sous de meilleurs auspices et l’on pouvait
sentir une petite pointe d’espoir retrouvé poindre dans l’atmosphère et ce, en
dépit de la présence de nombreux gardes pontificaux.
Préséa hocha la tête.
-Toi, Zélos, tu empruntera la
sortie sud avec son mari et le deuxième gamin, rajouta-t-il. Moi je prends
l’invocatrice.
Zélos fronça les sourcils et ses
bras resserrèrent leur emprise autour des cuisses de Sheena, toujours sur son
dos.
-Et pourquoi ça ? Je peux
très bien m’occuper d’elle. Pourquoi devrais-je te la confier ? Après tout
tu surgis de nulle part, tu donnes des ordres et tout le monde t’obéit…Tu
connais cet endroit comme ta poche, mieux que moi d’ailleurs, comme si tu avais
toujours vécu ici, mais pourtant il ne me semble pas t’avoir déjà vu dans le
coin. Et saches que je m’en souviendrai si cela avait été le cas. Désolé mon
vieux mais je ne vois pas pourquoi je te ferais confiance. Le seul qui pourrait
répondre de toi et confirmer tes dires, c’est Lloyd, et il se trouve qu’il
n’est pas là…
-Ca y est ? Tu as fini ton caprice
jeune blanc bec ? le coupa le mercenaire avec une pointe d’exaspération
dans la voix. Il se trouve que je suis le mieux placé pour faire sortir cette
fille discrètement de la ville. Si tu la gardes sur ton dos, étant donné
qu’elle ne peut pas marcher, tu auras tôt fait d’être repéré. Et si il faut
prendre la fuite, son poids te ralentira plus sûrement qu’un boulet en fonte
accroché au pied et elle retombera entre les mains auxquelles on vient de
l’arracher et toi avec. C’est cela que tu souhaites ? Foutre en l’air
cette expédition de sauvetage à cause de ton orgueil imbécile ? De ta
fierté ? Sache que cela n’a jamais sauvé personne, bien au
contraire !
Bon, on ne va pas tergiverser
cent sept ans. A rester ici nous allons finir par être découvert. Passe la
moi !
-Allez, je ne vais pas l’abîmer
ta précieuse petite fiancée…
-Quoi !? Ce n’est pas ma
précieuse… et puis d’abord ce n’est pas du tout ma fiancée !!! Rien à voir
enfin !!! se défendit l’Elu.
Quelle idée ! Je n’ai jamais
rien entendu d’aussi stupide ! Il est normal que je ne confie pas un de
mes compagnons blessé à un parfait inconnu qui s’improvise sauveur d’un jour ...
Elle, ma fiancée, c’est trop drôle… elle n’est pas mon genre de femme de toute
manière ! Et…
-Tout va bien Zélos, fit alors
Préséa en posant une main sur son avant bras. Il veut juste nous aider et je
pense que nous devrions lui faire confiance. C’est ce que Lloyd ferait, j’en
suis certaine. Et puis nous n’avons pas bien le choix, je pense.
-Bien, dit-il un peu sèchement.
Quel est le point de rendez-vous ?
-L’Abbaye du Sud Est, lui
répondit Kratos sur le même ton.
-L’abb … l’Abbaye du Sud Est… ?
pâlit l’Elu de Tésséha’lla. … bon… très bien. On se rejoint là bas. Allez
suivez moi vous autres !
Puis se retournant vers Préséa et
son petit groupe, il ajouta :
-Bonne chance Préséa…
L’intéressée lui répondit par un
petit signe de tête et partit dans la direction que lui avait indiqué Kratos
quelques instants auparavant. Zélos la regarda s’éloigner et se mêler à la
foule, avant de quitter lui aussi leur cachette momentanée. Il jeta un dernier
regard de ses yeux de glace au mercenaire, qui avait pris à présent Sheena dans
ses bras musclés. Celle-ci gémit à l’instant où Zélos s’apprêtait à partir et
il dû se faire violence pour ne pas faire demi tour et la reprendre tout contre
lui. Faisant abstraction de tout ce qui l’entourait, il s’élança à son tour
dans la cohue, talonné par le petit garçon de l’hôtelière et son père.
Le mercenaire ferma les yeux et
une aura blanche se mit à briller autour de son corps. Une paire d’ailes
immatérielles, semblable à celle de Colette, sauf qu’elles étaient de couleur
bleue, apparut l’instant d’après dans son dos.
-Accroches toi bien, murmura-t-il
à l’oreille de la jeune invocatrice. Je ne tiens pas à aller te chercher si tu
tombes de là haut.
Kratos resserra ses bras autour
de la taille de Sheena tandis qu’elle passait ses mains autour de son cou, et
donnant un violent coup de talon au sol, l’ange du Cruxis s’envola, emportant
dans les airs la jeune femme.
Il y avait très peu de chance
pour que quelqu’un lève le nez en l’air et les aperçoivent. Néanmoins, Kratos
battit des ailes avec force afin de s’élever le plus possible et d’être hors d’atteinte.
Se maintenir ainsi dans les airs n’était pas chose aisée surtout lorsque l’on a
quelqu’un qui s’accroche à votre cou et qui ne tient pas en place. Il avait
beaucoup de mal à conserver la jeune femme contre lui. Celle-ci qui, jusqu’à
présent avait garder ses paupières closes durant tout le temps qu’avait duré
l’ascension, ouvrit un œil puis l’autre. Elle ne pu réprimer un hoquet de
surprise en découvrant la distance entre eux et la terre ferme, et raffermit sa
prise autour de Kratos.
La plaine de Meltokio et ses
petits hameaux paysans s’étendaient sous ses pieds, et elle pouvait distinguer,
aussi minuscules que des fourmis, les rares travailleurs sur leur terre ainsi
que les quelques voyageurs empruntant la grande route. Le vent soufflait avec
force dans ses cheveux détachés qui fouettaient son visage, achevant de glacer
son corps transi vêtu de la simple tunique de lin blanc que lui avait donné
l’aubergiste après son plongeon dans les égouts.
Cette façon de voyager dans les
airs était bien plus impressionnante que l’utilisation des ptéroplans. Là au
moins, on pouvait contrôler la machine et il n’y avait pas le vide directement
en dessous. Elle n’était pas sûre d’apprécier le vol libre contrairement à
Kratos, qui lui, affichait un visage serein et confiant comme si il se
retrouvait dans son élément (4 000 ans de pratique, évidemment ça aide^^). La
morsure du vent n’avait nullement l’air de le gêner et après s’être rapidement
repéré, il pris la direction du sud est, vers une petite bâtisse au bord d’une
falaise, entraînant avec lui une Sheena pas très rassurée. Après tout, théoriquement
il était leur ennemi étant donné qu’il oeuvrait pour le Cruxis, et rien ne
l’empêchait de la lâcher dans le vide. Cette idée acheva de l’inquiéter et elle
se crispa d’avantage tout en tentant de contrôler ses incessants tremblements.
Kratos sorti son épée du fourreau
et fendit l’air devant lui afin de se débarrasser de son attaquant. Peine perdue,
le monstre poursuivait sa route et était déjà hors de porté.
-Merde ! jura-t-il entre ses
dents avant de s’élancer à tire d’ailes en direction de la jeune femme en chute
libre.
Il parait que lorsqu’on est sur
le point de mourir, votre vie défile devant vos yeux en quelques secondes,
comme une mise au point sur ses actes, bon ou mauvais, les joies, les peines,
les regrets, avant de cesser d’exister.
Comme dans un rêve, Sheena
entrevoyait par flashs une sombre forêt, la forêt de Gaorrachia
probablement ; une sensation de chaleur et de bien être. Puis la forêt
devint hostile ; des flammes ; un homme qui la prend dans ses bras
protecteurs. Le temple de Volt ; un immense éclair blanc. Des gens lui
crachant leur haine et leur colère au visage. Désespoir et solitude immense.
Nouvel espoir. Corrine ; sa disparition au temple de Volt. Chagrin intense.
Kuchinawa. Ses nouveaux amis ; Lloyd et Colette lui faisant un petit signe
de la main ; Kratos ; puis Régal, Raine, Génis et Préséa apparurent à
leur tour, un doux sourire illuminant leur visage. Et enfin, un homme à la
chevelure flamboyante se tenant de dos. Zélos. Se retournant, il tendit la main
vers elle avec un regard triste et secoua la tête en signe de négation, accablé
avant de s’éloigner sans un regard en arrière.
Une larme pris naissance au coin
de l’œil de Sheena et s’échappa dans les airs…
La fin était irrémédiable.
Non ! Il y avait encore
quelque chose qu’elle pouvait faire !
-J’ai besoin de votre aide !
Apparaissez ! SYLPHE ! FEAIRIE ! YUTIS ! cria-t-elle. [1]
Aussitôt les trois esprits
originels du vent se matérialisèrent et déchaînèrent un puissant souffle d’air
sous leur maître afin de ralentir sa chute.
« Bien joué Sheena »
pensa-t-il.
Le mercenaire tendit son corps
comme une flèche afin de gagner en vitesse. Quelques mètres au dessus d’elle il
redéploya ses ailes de Mana. La prise au vent qu’elles offraient devrait
pouvoir lui faire ralentir sa course…Les forces contraires s’exerçaient sur ses
ailes avec une telle puissance de Kratos en eu le souffle coupé. C’était comme
si on les lui arrachait sans anesthésie. Il se sentait complètement écartelé…Il
fallait qu’il tienne bon. Il le fallait absolument… autrement tout ce qu’il
avait entreprit, sa trahison, n’aurait servit à rien.
-Anna… donne moi la
force…murmura-t-il comme une prière alors que des larmes de douleur venaient
picoter ses yeux.
Les trois êtres de Mana dardaient
leurs yeux inquiets sur lui et redoublaient eux aussi d’effort pour enrayer la
chute de Sheena. Allait-il réussir à s’arrêter à temps ou allait-il les
percuter?
-Merci, fit-il en s’adressant à
Sylphe avec ses trois paires d’ailes, Feairie et Yutis et leurs ailes de
papillon.
-Nous n’avons fait que notre
devoir, lui répondirent ensemble les trois esprits originels. Nous n’avons fait
qu’obéir aux ordres du maître invocateur. Mais elle a épuisé la totalité de son
Mana, source de vie et de magie, pour faire appel à nous. Plus une seule goutte
ne parcourt son corps. Faites attention.
Et elles disparurent dans un
souffle de vent.
Kratos pencha sa tête vers celle
de Sheena et fronça les sourcils à la vue de la pâleur de son visage et de ses
lèvres bleutées. Ses tremblements étaient de plus en plus importants. Elle
haletait de plus belle. Les esprits avaient raison, le Mana ne circulait plus
en elle. En voulant se sauver, elle avait accéléré sa mort…étrange
paradoxe…Personne ne survivait bien longtemps à une absence de Mana dans son
corps.
Malgré l’atroce douleur dans son
dos, il accéléra son vol en direction de l’Abbaye du Sud Est, sans faire
d’avantage attention à la blessure de son épaule qui lui faisait perdre
beaucoup de sang. Il n’avait pas fait tout ça pour rien… !
En quittant Kratos et Sheena,
Zélos s’était senti rongé par l’inquiétude mais maintenant que les murs de la
cité de Meltokio étaient loin, il avait retrouvé son ton badin habituel et
regrettait de ne pas être parti avec la partie féminine de la famille de
l’aubergiste, plutôt qu’avec le mari et son petit garçon. Chemin faisant en
direction du point de rendez-vous, il avait bien essayé de détendre
l’atmosphère plutôt pesante avec des vannes de son cru, mais n’avait réussi
qu’à arracher un faible sourire compatissant à l’homme. Ce qui avait fini par
vexer Zélos, qui boudait à présent.
Sélès…
Le jeune Zélos avait donc
passé son adolescence loin de sa famille, entouré de vieux professeurs de
l’académie de Syback qui lui répétaient de garder son sérieux, que son
comportement n’était pas digne d’un Elu et qu’il fallait qu’il grandisse un
peu. Ne pouvait-il pas faire honneur à la famille Wilder ? Son père serait
très déçu si il constatait le peu de sérieux avec lequel son fils étudiait. La
petite Sélès se montrait beaucoup plus docile et plus douée que lui.
Au début, il les avait écouté
et s’était lancé corps et âme dans ses études. Il voulait tellement gagner
l’estime de son père et que celui-ci le regarde à nouveau. Lors de ses rares
visites à Syback, Mr Wilder interrogeait longuement son fils sur ce qu’il avait
appris et déclarait ensuite d’un ton dur que cela n’était pas suffisant et que
Sélès était beaucoup en avance pour son âge. Et Zélos ravalait ses larmes de
déception une fois encore. Que fallait-il donc qu’il fasse pour que son père
soit fier de lui ? Pas une seule fois depuis le fameux jour où sa mère
avait trouvé la mort, il n’avait posé les yeux sur lui. Pas une seule. Etait-ce
donc sa faute ? Etait-ce cela que son père voulait lui faire
comprendre ? Il avait fini par développer une rancune tenace envers son
père et sa petite demi-sœur si aimée de tous et si parfaite.
Et puis l’adolescence était
venue avec ses premiers émois, et le jeune Elu découvrit bien vite qu’il ne
laissait pas indifférentes ses petites camarades de classe. Il était si facile
de les manipuler en leur promettant la lune et en les embobinant, avec de
belles paroles qu’il ne pensait pas. Voilà que son statut d’Elu pourrait enfin
lui servir à quelque chose... autant en profiter. Les filles ne pouvaient rien
lui refuser et étaient prêtes à tout pour un peu d’attention de sa part.
Cela avait commencé par des
menus services qu’elles lui rendait pour lui être agréable, sans qu’il demande
quoique se soit. Profitant de leur dévouement, il commença à leur demander de
faire ses corvées à sa place, puis ses devoirs et enfin de passer les examens à
sa place, présentant toujours la chose comme si il leur demandait là une
immense faveur. Même les professeurs du sexe féminin tombaient sous le charme
de cet adolescent au sourire ravageur qui semblait d’avantage doué pour séduire
les filles que pour apprendre les mathématiques. La seule autre matière dans
laquelle il excellait, outre le combat, était l’astronomie. Ce qui n’avait pas
été sans étonner ses professeurs, jusqu’à ce qu’ils se rendent compte que ce
n’était que pour parfaire sa technique de drague (ce Zélos, j’vous jure -_-‘).
« Les filles sont tellement sensibles à la beauté des étoiles » l’avaient-ils
entendu se vanter auprès des autres garçons.
Le jeune Elu n’avait pas
autant de succès avec eux qu’avec les filles. Beaucoup le considérait comme un
beau parleur bourré de fric un peu efféminé, et aucun n’appréciaient les
faveurs dont il était le bénéficiaire. Très vite, ils avaient pourtant appris
que se frotter à lui n’était pas la meilleure idée qu’ils aient eue… En
escrimeur hors paire, Zélos avait tôt fait de faire mordre la poussière à ceux
qui le provoquaient en duel. Ceci lui avait fallu d’interminables séjours dans
le bureau du Doyen, à subir des sermons qu’il ne prenait même pas la peine
d’écouter :
-Votre conduite est
inadmissible ! J’ai fermé les yeux la dernière fois mais cette fois ci
c’est trop ! Il est encore à l’infirmerie et les médecins ne savent pas si
il pourra se servir de son œil à nouveau !
-…
-Ses parents sont dans
l’antichambre et vont porter plainte au Roi ! Sachez qu’ils font beaucoup
de dons à cette université et…
-Et alors ? demanda le
jeune Elu en dissimulant à peine son bâillement de lassitude. Qu’est ce que ça
peut me faire ?
-Comment ça, qu’est ce que ça
peut vous faire ??? explosa le vieil érudit. Vous rendez vous compte de ce
que vous avez fait ??? C’est très grave !
-Mmmh…Je n’ai fait qu’accepter
sa provocation en duel, je ne l’ai pas forcé, répondit Zélos d’une voix égale.
Il aurait dû savoir à qui il avait à faire avant de vouloir se venger à propos
de sa petite amie… comment s’appelait-elle déjà ?...Ah oui, Suzie !…
quelle stupidité, ajouta-t-il en soupirant et en croisant les jambes, assis
dans l’épais fauteuil en cuir faisant face au bureau du Doyen.
Le vieil homme le fixa avec
attention, se retenant d’asséner une bonne gifle à cet arrogant élève. Son
prédécesseur avait fait preuve de beaucoup trop de laxisme à son égard
semblerait-il. Cet enfant était tout bonnement insupportable !
-En ce qui concerne l’argent
versé à votre établissement, ne vous en faites pas. Mon père se fera un plaisir
de vous dédommager de vos pertes. Il ferait n’importe quoi pour ne plus avoir à
entendre parler de mes frasques. Pour ma part…Non laissez, ce n’est pas
important, ajouta-t-il avant de prendre congé dans un sourire froid.
-Restez assis !!! Je n’en
ai pas fini avec vous « Elu » !!! Votre sœur, elle !… cria
le Doyen.
-Demi sœur…
-Je vous demande pardon ?
-Sélès est ma demi sœur. Dans
nos veines, ce n’est pas le même sang qui coule…C’est elle qui aurait du naître
avec ce foutu cristal dans sa main [2], pas moi… dit-il dans un murmure.
-…
-Restons en là voulez
vous ? J’ai à faire. Bonne journée Monsieur, fit Zélos d’un air faussement
enjoué.
-Ne vous en faites pas les
filles, ça c’est très bien passé, l’entendit dire le Doyen. Votre serviteur
s’en sort toujours. Allez venez mes chéries, allons ailleurs que je puisse
contempler au mieux votre beauté. Cela illuminera le reste de ma journée.
Les petits cris des filles
retentirent dans le couloir.
Pour la première fois depuis
qu’il avait quitté la demeure familiale, Zélos allait rencontrer sa demi-sœur
si détestée. C’était à l’occasion des fêtes de la nouvelle année. Son père,
affaibli par une maladie qui touchait ses poumons, voulait sans doute se donner
encore l’illusion d’une famille unie. C’était ce qu’en avait conclu Zélos en
découvrant l’invitation.
Il avait songé tout d’abord à
ne pas y aller, et puis il s’était dis que c’était exactement ce que voulait
cet homme qui disait s’appeler son père. Il irait donc, uniquement pour voir
l’aversion et le mépris qu’il lui inspirait se peindre sur le visage de son
géniteur.
Levant la tête, il remarqua
une petite fille qui l’observait à travers les carreaux d’une immense fenêtre.
Pendant de longues minutes, ils restèrent ainsi à se fixer, à essayer de se
reconnaître l’un en l’autre. Puis la fillette fut tirée vivement en arrière et
disparut du champ de vision de Zélos. Seul l’épais rideau pourpre qui se
balançait encore, attestait de la présence d’une personne quelques instants
plus tôt.
Zélos sourit intérieurement.
Evidemment, on avait dû lui raconter tout un tas d’histoires à son sujet, que c’était
un égoïste, doublé d’un coureur de jupon et d’un incapable, qu’il ne fallait
surtout pas essayer d’avoir des contacts avec lui autrement il allait vous
pervertir. Ce n’était pas un bon élu. Il était inutile, ne servait à rien et
n’aurait jamais dû venir au monde. Cela aurait dû être elle l’élue, pas lui…
Il soupira une fois encore et
s’apprêta à soutenir le regard méprisant de son père. Son père qu’il avait
tellement craint étant plus jeune et qui lui faisait tellement pitié
aujourd’hui…
Il ouvrit à la volée les
grands panneaux en bois cloutés et sculptés avec raffinement, sans prendre
seulement la peine de frapper, ou encore d’attendre qu’un domestique vienne lui
ouvrir.
-Salut la compagnie !!!
s’exclama-t-il avec un sourire outrageux mais son regard était on ne peu plus
glacial. Désolé pour le retard ! Je sais que vous vous languissiez de moi,
mais j’ai été retardé par une urgence sur le chemin… Et oui, c’est ce qu’on pourrait
appeler la rançon du succès ! Alala… Toutes ses jolies jeunes filles qui
veulent accaparer un peu de mon temps… c’est dur. Mais on s’y fait vite. Tenez
mon brave, ajouta-t-il en tendant son manteau au majordome.
Il s’avança ensuite vers une
femme d’une trentaine d’années, guindée dans une robe sobre et sombre qui
contrastait avec les habits richement décorés de l’Elu de la régénération.
-Ma chère belle-mère… Mes
hommages, dit-il en lui baisant la main et en ignorant volontairement la
fillette qui se trouvait à ses côtés. Quel temps épouvantable n’est-ce
pas ? Père n’est pas avec vous ? C’est encore son angine de poitrine,
je parie…
Lui prenant le bras, il
l’entraîna dans son sillage, tout en continuant de parler avec animation et un
enthousiasme exagéré. La pauvre femme n’arrivait pas à en placer une et
paraissait d’ailleurs assez contrite. Le fils de son mari était décidemment
bien trop exubérant.
Il posa ses yeux sur Sélès,
qui s’était éclipsée à la fin du repas. Il ne lui avait pas adressé la parole
de la soirée, pas accordé un seul regard. Il s’était montré froid et distant au
possible vis à vis d’elle et pourtant elle était là, dans la froideur de cette
soirée d’hiver, avec sa jolie robe de velours bleu, à le fixer de ses grands yeux
tristes.
-Qu’est ce que tu me
veux ? répéta Zélos avec une pointe d’impatience dans la voix.
La fillette ne lui répondit
rien mais continuait de le fixer avec des yeux implorants.
Elle voulait comprendre.
On lui avait toujours décrit
l’Elu de façon très laide et elle voulait se faire sa propre opinion. Tout ce
qu’elle avait vu ce soir, c’était un enfant enfermé dans une grande solitude,
tout comme elle. Un enfant qui ne cherchait que l’amour et la reconnaissance de
ses parents [3].
Il était son frère après tout.
Son grand frère. Rien que ce mot lui donnait des frissons d’excitation. Elle
n’était pas seule, elle avait un frère. Bien sûr elle adorait sa mère, mais ça
n’était vraiment pas la même chose.
Zélos et Sélès se fixaient en
silence, se fouillant mutuellement du regard. Combien de temps restèrent-ils
ainsi dans la froideur de l’hiver ? Un instant ? Une
éternité ?...Qui sait…
Sélès ouvrit la bouche mais un
domestique l’interpella et arriva en courant vers elle. Zélos le regarda venir
vers eux en pestant contre toute cette neige qui rendait l’allée glissante,
puis il regarda Sélès qui avait baissé les yeux, gênée.
-Le message est passé petite sœur,
lui dit-il avec un doux sourire. Tiens. Si tu attrapes une pneumonie ça va
encore être de ma faute.
Il se pencha vers elle, défie
l’écharpe autour de son cou et l’enroula autour du cou de la fillette. Se
relevant, il lui ébouriffa les cheveux d’un geste tendre et franchit les
grilles sans se retourner.
Sélès sursauta. Elle se
retourna et elle vit le domestique qui lui faisait signe de rentrer avec impatience,
visiblement pas très content d’avoir eu à lui courir après sous toute cette
neige. L’enfant se retourna vers la grille d’entrée mais l’Elu avait déjà
disparu de son champ de vision. Elle soupira et suivit le valet en silence,
l’écharpe épaisse et douce serrée contre son cœur…//
L’Elu de Tésséha’lla se composa
un visage pour la circonstance et franchit avec détermination le portail entouré de hauts murs qui
annonçait le début du domaine de l’abbaye
[2]Les Elus du Mana naissent en tenant dans leur main un cristal du Cruxis. Celui-ci est ensuite déposé dans un temple de l’Eglise de Martel jusqu’à ce que l’heure de la régénération sonne et que l’Elu se présente pour entre la prophétie. Dans le jeu c’est ce que dit Colette à Génis et Lloyd avant de se rendre au temple d’Isélia, et le cristal du Cruxis de Zélos est en fait gardé par sa sœur Sélès.
[3] Précoce pour son âge la
petite hein ?^
Souvenirs, souvenirs
Sheena : Qu’est ce que tu
fais Zélos ?
Z : Je regarde des vieilles
photos. Regarde ! Tu trouves pas que j’étais à croquer ?
S(jette un coup d’œil) :
Mmh… mouais, si tu le dis.
Z : Atta, jette un œil sur
celle ci. Aaah la belle époque… j’avais déjà beaucoup de classe et toutes les
filles étaient folles de moi.
S : Ca c’est bien un truc
que je ne comprendrais jamais.
Z : Tu es jalouse
Shee ?
S : Hein ???!!
Quoi ???!! Mais pas du tout mon cher !
Z (chantonnant): Sheena est
JA-LOUSE.
Génis : Salut vous
deux ! Vous faites quoi ?
Z(mets la main devant la bouche
de S) : Je montrais à Sheena des preuves de mon maintien naturel de roi^^
G(feuillette l’album pendant que
S essaye de frapper Z) : mouais…mouais…Ah ! Mais c’est que c’est très
intéressant ça ! Arrêtes toi deux secondes Sheena et viens voir ça !
Ca vaut le détour
S arrête de poursuivre l’Elu et
va voir G.
Z (gêné) : C’était même pas
les miens… et d’abord rendez moi ça vous deux !!!